L’éco-psychothérapie, ou thérapie en Nature, ouvre toute une palette d’expériences pour accompagner sur leurs chemins ceux et celles qui viennent nous consulter.
Je vous propose à travers cet article d’illustrer l’une de ces façons d’associer la Nature à un processus de thérapie.
Dans l’exemple que je vous présente ci-dessous, il s’agissait d’accompagner mon patient dans sa façon d’appréhender la vie et ses défis. Après plusieurs mois de séances en cabinet, à l’évocation de nouveaux défis de vie le faisant chanceler, je décidai de lui proposer quelques séances en forêt. Bien nulle part, toujours en insécurité dans son environnement, ou à élaborer des tas de stratégies, son rapport à la vie était teinté de lutte perpétuelle. A l’aube d’un énième déménagement, il exprimait sa difficulté à s’enraciner, à s’ancrer quelque part. Cela voulait dire, pour lui, devoir renoncer au choix de tous les possibles, prendre le risque de s’enfermer dans un déterminisme statique. Tout en réalisant que cela l’empêchait de vivre sereinement.
Je choisis alors de profiter de la forêt pour travailler son incarnation, sa façon de prendre sa place et d’avancer dans le monde. Au contact de la forêt, séance après séance, il redécouvre des souvenirs d’enfance heureux en Nature. Il s’ouvre à “la douceur de cette matrice” qu’il se surprend à ressentir.
Lors d’une de ces séances de thérapie en Nature, alors qu’il nomme se sentir perdu dans ses doutes, agité dans sa tête, je lui propose de parcourir la forêt pour choisir un arbre. Un arbre qui pour lui est bien enraciné, incarné, ou qui pourrait illustrer comment il se sent dans son rapport à la vie ; un arbre qui le touche, “qui lui parle”.
Il marche longtemps en silence. Hésite devant des arbres déracinés, des cabanes d’enfant, pour finalement choisir un arbre “bien droit et doux à la fois (couvert de mousse), qui a de l’espace autour de lui, des racines apparentes, pas d’autre arbre au-dessus ou adossé à lui, et ouvert vers le haut”.
Cette séance sera très émouvante pour lui. Je lui propose de rentrer en contact avec cet arbre, qui fait alors figure de projection de ce qu’il souhaite vivre. Petit à petit je l’invite à le toucher, puis à faire corps avec lui, de s’adosser à son tronc, de sentir sa colonne contre son écorce, ses pieds en contact de ses racines… Puis je lui propose de demander à l’arbre, en figure d’altérité, de lui transmettre comment il a fait pour s’incarner comme ça, ses conseils, son énergie.
Avec une méditation guidée, je l’accompagne dans ce contact. Je l’invite à sentir les mouvements de vie de l’arbre et leur écho en lui. Par exemple je lui propose de ressentir qu’à l’inspir, c’est comme la sève et l’énergie du sol qui montent en lui ; qu’à l’expir, ce qui est obsolète, les charges trop lourdes, retombent ; comme l’arbre qui naturellement laisse ses feuilles et branches mortes tomber et retourner nourrir le cycle de la vie.
Je lui suggère aussi de sentir le sol, que ce sol relie tous les arbres de la planète. Peu importe où il se trouve, c’est la même planète, le même noyau qui nourrit la vie.
Je vois des larmes couler de son visage. Après de longs moments en silence, il nomme : “C’est la première fois que je sens le sol vivant sous mes pieds. La première fois que je sens pouvoir rendre mes tensions à la Terre”
Puis je l’invite à se mettre en mouvement, les yeux fermés, de sentir ses pieds avancer et s’adapter aux reliefs du sol, de sentir dans quel sens son corps, ses pieds le mènent.
“C’est la première fois que je me fie qu’à mes pieds et non à mes yeux pour avancer : c’est si nouveau pour moi ! je me sens enraciné mais aussi mobile, léger !”.
Lors de la méditation guidée, l’arbre lui a transmis des sagesses bouleversantes pour lui : “Je n’ai rien fait de spécial, il y a juste une loi pour ça = c’est la loi du vivant : une graine, de l’eau et du soleil, et je pousse”.
Il prend conscience que cette loi du vivant, finalement, prévaut sur toutes les autres. Enfermé dans les lois familiales si fortes de son enfance, il fait l’expérience cette fois dans ses cellules de la force de cette Loi du Vivant qui permet de grandir et d’avancer. Si simple et si puissant.
Il ne dit que peu de mots sur la fin de la séance, il est pleinement en train d’intégrer ces ressentis nouveaux très forts pour lui.
Cette séance reste des mois plus tard un moment fort auquel il fait souvent référence. Régulièrement, il revient puiser dans ce lien à cet arbre avec qui il continue de se relier en souvenir lorsqu’il en ressent le besoin. Son corps est aussi manifestement plus posé, plus dense lors de nos séances. Il apprend à plus écouter ses ressentis pour s’orienter dans ses choix. Il accueille plus facilement ses émotions, de plus en plus confiant dans sa capacité à pouvoir les faire circuler. Avec cette exploration de son incarnation au contact de la Nature, c’est toute sa sécurité existentielle qui se bâtit depuis.
Solen Lombard
Analyste Psycho-Organiste
Praticienne en éco-psychothérapie
à Vannes (Morbihan, Bretagne)
En savoir plus : www.solen-lombard.fr
Photo : copyrigth Solen Lombard